Les clefs du Bornage Judiciaire

Le Bornage Judiciaire

 

 « Tout propriétaire peut obliger son voisin au bornage de leurs propriétés contigües. Le bornage se fait à frais communs. », Art. 646 du Code Civil

Il est pourtant parfois des cas où ledit voisin refuse le bornage. Comment procéder alors que le Code de L’Urbanisme impose le bornage avant certaines opérations foncières ou tout simplement s’il est souhaité de borner sa propriété pour en garantir les limites ?

La solution est le bornage judiciaire.

Quelles sont les caractéristiques d’un bornage judiciaire ?

 

Les prémisses du bornage judiciaire

A l’issue d’un échec de signature du voisin au cours d’un bornage amiable, le propriétaire concerné peut décider de poursuivre la procédure de bornage afin de la mener à bien.

Alors que la procédure de bornage judiciaire relève depuis le 1er Janvier 2020 de la compétence de la Chambre de proximité rattachée au Tribunal judiciaire dont dépend la localité où se situe le terrain faisant l’objet du bornage, une tentative de médiation ou de recherche de solution amiable par le propriétaire est obligatoire avant de pouvoir exercer une action en justice. Le juge saisi par requête ou par assignation par le propriétaire ou son avocat, vérifiera que cette étape préalable a été menée à bien avant de débuter l’instruction du dossier.

 

La désignation d’un Expert de justice

Le juge saisi de l’affaire va procéder à la désignation d’un Expert de justice.

Ce dernier sera de préférence choisi parmi les Experts inscrits sur la liste des Experts de la Cour d’Appel ou de la Cour de Cassation connaissant les affaires jugées par les Tribunaux/Cour d’Appel de son ressort.

Cette liste publique, classe les Experts suivant des rubriques représentant leur domaine de compétence.

En aucun cas, l’expert désigné pour le bornage judiciaire ne peut être le Géomètre-Expert qui a mené l’opération de bornage amiable.

L’Expert de justice ainsi désigné a pour devoir d’étudier la mission qui doit lui être confiée et il est de son devoir le plus absolu de refuser la mission dans le cas où il ne pourrait garantir son impartialité et son indépendance au cours de la mission.

 

Le déroulé de la mission

Les parties ont la possibilité de se faire représenter par un avocat.

Une fois désigné, l’Expert doit accepter la mission puis convoquer toutes les personnes- et non uniquement les avocats- à l’adresse du lieu communiquée par le Tribunal.

L’Expert recueille les dires des parties et procède à un relevé de l’existant et notamment le voisinage de la limite litigieuse. Il peut également recueillir toutes les informations nécessaires à sa mission, notamment auprès de ses confrères ou de professionnels et peut aussi faire appel à un sapiteur pour un volet de la mission qui nécessiterait une étude approfondie en dehors de ses compétences. L’étendue de son champ d’action est large : à tout moment, le juge peut enjoindre l’une des parties ou un tiers de communiquer une pièce nécessaire à la mission d’expertise.

L’Expert s’assure qu’à tout moment de la mission, les parties disposent des mêmes informations et doit éviter tout contact individuel avec l’une des parties au cours de la procédure afin de respecter le contradictoire. La violation du principe du contradictoire entraine de facto la nullité du rapport d’expertise.

Dans le cas de pièces non communicables, l’Expert les réunit au sein de son cabinet pour consultation.

L’Expert rédige un pré-rapport d’Expertise qu’il soumet aux parties et leurs avocats afin de prendre connaissance des faits établis et indique la date prévue de son rapport final. Les dires et droits sont à communiquer à l’Expert dans le délai qui leur a été communiqué.

A l’issue de cette phase, l’Expert peut rédiger son rapport final qu’il doit déposer auprès de la juridiction dans le délai qui lui a été imparti.

 

Le cas de conciliation des parties au cours de la mission

En cas de conciliation des parties au cours de l’expertise, l’Expert doit interrompre sa mission et en avertir le juge.

 

Le rapport d’Expertise

Le rapport de l’Expert doit répondre aux questions posées par le juge. Il n’existe pas de formalisme pour le rapport;néanmoins, il existe un plan traditionnel, à savoir le préambule au sein duquel l’Expert rappelle la mission qui lui a été confiée, puis l’exposé chronologique des opérations d’expertise, une discussion technique dans laquelle l’Expert répond concrètement aux chefs de sa mission et enfin la conclusion.

Les dires des parties doivent être intégralement reproduites en annexe.

Une fois son rapport terminé, l’Expert le dépose au Greffe de la juridiction et le transmet aux parties. Le dépôt du rapport marque la fin de la mission de l’Expert ; néanmoins, le juge peut demander à l’Expert d’exposer verbalement son rapport au cours de l’audience.

Le rapport représente une pièce maîtresse du dossier mais il incombe au juge de décider ou non de son entérinement.

 

La suite de l’expertise de Bornage Judiciaire

Si l’affaire est en état d’être jugée, la juridiction peut rendre la décision à l’issue de l’audience.

La décision de jugement est notifiée aux parties par le Greffe. Dans le cadre d’un jugement en premier ressort, le délai d’appel est d’un mois à compter de la notification.

A l’issue de ce délai, la partie demanderesse peut requérir un certificat de non-appel, lequel sera nécessaire au Géomètre-Expert pour la pose des bornes. Ce certificat qui permet de mettre à exécution la décision, doit être demandé auprès de la juridiction susceptible d’appel.

 

Isabelle Santarelli, Géomètre-Expert, Cabinet IGEO Conseils

contact@igeoconseils.com

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